SHICHIFUKUJIN – THE SEVEN GODS OF FORTUNE
Pour Saxophone et Fanfare. – Commandité par et dédicacé à mon cher ami Ulric Berg.
Par Romain Zante (2022)
Cette pièce est librement inspirée par la légende des sept dieux du bonheur japonais. Chaque mouvement met en scène un des dieux, caractérisé par un saxophone différent. L'ensemble de la famille des saxophones est ainsi représentée.
Si certains des mouvements comportent quelques allusions à la musique japonaise (percussions asiatiques, gammes, etc.), c'est plus le caractère de chacun des dieux qui fut à la base de la composition, et non leur origine asiatique. J'ai donc voulu éviter de tomber dans une caricature de musique extrême-orientaliste et suis volontairement resté dans un langage occidental.
INTRODUCTION - TAKARABUNE “The Dragon Headed Treasure Ship”
Dans le folklore japonais, Takarabune est un bateau légendaire manœuvré par les sept dieux du bonheur durant les trois premiers jours de chaque nouvelle année. La nuit du 2 Janvier, il est de coutume de placer sous son oreiller une image représentant le bateau et ses occupants fantastiques. Selon la croyance populaire, le rêve fait alors donnera une indication sur la réussite de l'année qui commence. Si le rêve est doux et heureux, alors l'année apportera bonheur et prospérité. Si au contraire le rêve se révèle être un cauchemar, on peut conjurer le sort en jetant l'image du bateau dans la rivière...
Ce mouvement introductif représente l'arrivée nocturne silencieuse de ce bateau merveilleux. Un motif très simple, que l'on retrouvera tout au long de l’œuvre, pose les bases de la pièce. Ici il représente les flots calmes sur lesquels évolue l'embarcation. Puis, chaque dieu est évoqué de manière plus ou moins évidente, par un thème ou motif qui lui est propre. Chaque thème/motif sera ensuite développé dans le mouvement correspondant à chaque dieu.
EBISU “God of Ocean”
Le seul des sept dieux qui trouve son origine dans la mythologie japonaise. Dieu de l'Océan, il est par extension devenu le dieu des pêcheurs et de tout ce qui se rapporte au monde marin. Annonciateur de chance et de prospérité, il est souvent représenté tenant un poisson dans la main gauche et une canne à pêche dans la main droite.
Ce mouvement dépeint la grandeur de ce dieu parmi les plus vénérés, associée à l'immensité de l'océan. Il est confié au saxophone basse.
DAIKOKUTEN “The Magic Mallet”
Serait le père d'Ebisu. Dieu de la terre, du commerce et de la prospérité, on l'associe souvent aux bonnes récoltes. Il tient dans sa main droite un maillet magique, dans sa main gauche un grand sac rempli d'argent et d'objets de valeur, et est très souvent décrit comme reposant sur deux gros sacs de riz, symbole de fertilité. S'il est souvent représenté très souriant et sympathique, Daikokuten possède aussi un côté plus sombre et irritable qu'il doit à ses origines hindoues où il est appelé Mah k la et est vénéré comme dieu de la guerre.
Les fantasmes qui entourent le maillet magique sont nombreux. Selon les interprétations, il ferait tomber des pièces d'or à chaque secousse, ou réaliserait les vœux lorsque frappé trois fois contre le sol. Aussi, richesse chance et bonheur seraient assurés à quiconque volerait une reproduction du dieu ou de son maillet sans se faire prendre. Ces croyances ont donnée naissance à une étonnante tradition nommée Fuku-nusubi, pendant laquelle les petits et grands enfants s'amusent à voler les images ou statuettes de Daikokuten en espérant ne pas se faire attraper.
Ce mouvement, très vif et brillant, se concentre essentiellement sur cette tradition. De jeunes enfants s'engouffrent dans une foule lors des festivités du nouvel an, et s'amusent à chaparder les figurines de Daikokuten sur les différents étals. Ils agitent le maillet, frappent le sol par des séries de trois coups et émettent des vœux à voix haute, entrecoupés d'éclats de rires. Mais ces enfantillages ne sont pas du goût de la divinité qui leur apparaît dans une hallucination terrifiante...
Le saxophone choisi pour représenter Daikokuten est le saxophone ténor.
FUKURUKOJU & JUROJIN “Gods of Longevity”
Fukurukoju et Jurojin sont souvent associés voire confondus. Dieux de la longévité, de la sagesse et de la philosophie, ils sont parfois décrits comme partageant le même corps. Il est donc logique qu'ils partagent ici le même mouvement.
Très statique et méditatif, le mouvement nous plonge dans un état contemplatif. Les différents gongs et bols tibétains nous invitent à la méditation, tout comme le « mantra des miracles » qui est énoncé à plusieurs reprises. Le tout nous rappelle les origines taoïstes de Fukurukoju. Le saxophone contrebasse, qui représente la divinité sans âge, vient associer sa voix rauque à l'atmosphère de relaxation générale.
Une courte transition permettant au soliste d'empoigner le saxophone alto nous amène au dieu Jurojin, qui poursuit le mouvement avec un peu plus de lyrisme, mais toujours beaucoup de sérénité.
BENZAITEN “Goddess of Art and Beauty”
Déesse de la musique, des arts et de la beauté, mais aussi de l'éloquence et de la grâce, Benzaiten est la seule divinité féminine parmi les dieux du bonheur. Naturellement confié au saxophone soprano pour sa douceur et sa souplesse, ce mouvement est une évocation très simple du bonheur procuré par l'amour, la beauté et l'art, suprême félicité de l'âme.
BISHAMONTEN “God of War andguardian of the Temple”
Dieu de la guerre, Bishamonten est une divinité puissante et respectée. Représenté vêtu d'une armure impénétrable, il est le protecteur des guerriers et le punisseur des malfaiteurs. Il est aussi souvent considéré comme le gardien infranchissable du temple de Bouddha. Ainsi on retrouve souvent des statues imposantes de Bishamonten à l'entrée des temples bouddhistes.
Ce mouvement, violent et féroce, donne la parole au saxophone baryton, dont les accents sonores et agressifs répondant aux percussions taïkos représentent parfaitement le caractère belliqueux de Bishamonten.
HOTEI “The Laughing Buddha”
Hotei, aussi appelé « Le gros Bouddha », ou « Le Bouddha rieur », est le dieu de la joie et du bonheur. Très populaire parmi les enfants, il est considéré comme leur gardien. Personnage sympathique, il est toujours représenté avec un large sourire et un énorme ventre, signe de félicité. Selon les croyances, frotter le ventre d'une statue d'Hotei apportera bonheur et chance.
Le rôle d'Hotei est ici confié au saxophone sopranino, dont la petite taille et le son aigu font penser à un jouet. Mouvement vif et léger, il exprime les bonheurs simples et enfantins, et est ponctué d'éclats de rire du « Bouddha rieur »...